Mercredi 3 avril 14H30 :
Le départ est lancé. Il fait beau.
La Kungsleden démarre au bout du parking de la gare.
Très vite la première croix de Saint André. Je me demande pourquoi elles sont autant rapprochées. J'aurai la réponse plus vite que prévu.
Le début de la Voie Royale traverse des forêts de bouleaux clairsemées. Quelques pins parsemés. Je trouve les paysages sans trop d'intérêt. La végétation est monotone. Du bouleau, du bouleau et encore du bouleau … vivement les vacances.
La Pulka m entraîne en montée : dur dur. Il faudrait mettre les peaux de phoque mais j'ai la flemme de m'arrêter, d'enlever le harnais, de faire une conversion car le sentier est trop étroit pour faire demi tour, de retirer les sangles de la pulka …
Je commence à avoir super mal aux chevilles
16H : la neige arrive
Le vent se lève
Une vraie tempête. C'est fou comme le temps change vite mais les habitués des pays scandinaves le savent bien. Le gulf stream doit influencer ces brusques changements de météo dont il faut particulièrement se méfier. Je ne vois plus à 50 mètres : merci les croix de Saint André aussi rapprochées !
18h30 : je plante le bivouac . J'ai une tente Hilleberg Nammatj 2GT. C'est une tente tunnel 2 places. Elle est plus rapide à monter qu'une géodésique et offre une excellente résistance aux vents. Par contre elle est moins haute. Elle a 3 arceaux qui sont identiques et qui n'ont pas de sens de montage. Avec un peu d'expérience je mettrai moins de 30 minutes à la fin de mon séjour pour l'installation complète de mon campement sachant que le montage de la tente me prends moins de 10 minutes. En bivouac itinérant c'est forcément un critère de choix important a fortiori quand on est seul. Le modèle 2GT désigne l'option grande abside qui me permet de rentrer la pulka. Je la retourne et l'utilise comme banc pour cuisiner et manger. (quelques indications de montage à la fin du récit)
Une fois le bivouac installé ma seconde priorité est de sortir l'IPAd et de retrouver ma famille : la bande à Laurent Ruquier. Ensuite je me mets au sec. Je me change de la tête au pied. Comble du luxe j'enfile à la place de mes grosses chaussures de skis mes chaussons en duvet : royal. Mes pieds me disent "merci".
Après c'est la corvée de faire fondre de la neige et de remplir mes thermos d'eau bouillante. Un thermos de 1 litre et un autre de 75 cl. J'ai également un thermos Lunch qui me sert pour mes soupes et bolino que je rempli également.En tout je dois préparer 2 litres d'eau. Faut compter environ 30 minutes pour cette opération, 1 heure si j'ai le courage de préparer le petit déjeuner.
En ce qui concerne l'alimentation je prévois environ 900 grammes à 1 kgs par jour soit 4000 Kcal. ce qui est un minimum : soupes et croutons, bolino, saucissons, chorizo, chocolat, fruits secs, muesli et lait concentré, thé, café et infusions, gateaux secs... je tournerai vite en boucle.
Il est environ 20H lorsque je peux manger ... je tombe de sommeil.
21H extinction des feux.
Il neige toute la nuit. Des grosses rafales de vent à la clé.
Bilan de la journée : 10 kms 4 heures de marche. Et ben Pépère on y va doucement !
Jeudi 4 avril :
Réveil 7H : j'ai très bien dormis et j'ai bien récupéré après 10H de sommeil
ll fait de nouveau super beau ce matin. Il fait -12°ou plutôt 12° (en suédois) car ici, et ce n'est pas une blague, inutile de préciser que l'on est en négatif !
Départ 10H30.
Je commence par une traversée magique du lac d'Abisko. Je me familiarise avec le grands espaces à traverser où avec mes 3,5 kms/h. rien à l'air de bouger : patience, humilité ...
Midi : étape au refuge d'Abiskojaure. Ces refuges sont appelés Huttes. Il y en a environ tous les 20 kilomètres sur la Kungsleden. Ils sont gardés et particulièrement soignés. La kungsleden se fait principalement de Hutte en Hutte avec un sac à dos léger. L'alimentation s'achète à la boutique de ces refuges. On peut également en profiter pour faire un vrai Sauna en fin de journée.
A environ mi-chemin de ces étapes on peut trouver de très belles huttes de secours.
La coutume veut que chacun participe à la vie de ces refuges en vidant les sceaux des eaux usagées, en allant chercher de l'eau au puits ou en coupant du bois. Le ménage est également à faire. 60 couronnes sont demandées en tant que visiteur et 40 Kr. si vous avez acheté la carte de l'office du tourisme du parc d'Abisko STF Svenska Turistföreningen (qui s'amortie je crois très vite). Je ne connais pas les tarifs à la nuit.
Après environ 2 kilomètres du refuge je commence une grande montée et cette fois-ci j'ai mis les peaux de phoque : ça va tellement mieux
Arrivée sur un plateau magnifique
Les paysages sont très ouverts
17h30 bivouac à coté d'une hutte de secours : Radunjarga où il y à déjà deux finlandaises : Lina et Alex. Elles ont fait du feu et il fait bien chaud. Je leur propose de partager mon thé et du chocolat. De leur côté elles m'offrent le dîner : riz Thaï avec poulet : super sympa. À 20h je vais me coucher dans ma tente : pépère est fatigué !
Bilan de la journée 6h30 de ski et 20 kms réalisés
Vendredi 5 avril :
Grasse matinée : réveil 10h - 12 heures de sommeil !
Le temps est génial. Il fait froid mais c'est une vraie tempête de ciel bleu.
-22° cette nuit. J'ai un duvet prévu pour descendre à -39°et à -18 en confort. Associé à un excellent matelas gonflable je dors comme un bien heureux. Le seul petit hic c'est cette condensation. Elle gèle durant la nuit et je la retrouve en paillette dans toute la tente : un vrai supplice au lever pour ne pas la toucher. Je ne sais pas comment la limiter. Je sais que ma meilleure amie c'est alors ma petite balayette (on se contente de ce que l'on peut !) qui me permet de faire rentrer le minimum de neige dans la tente et de nettoyer mes chaussures. Mais malgré ces précautions je me retrouve le matin avec le dessus du matelas gonflable et le dessous du duvet complètement mouillés. Je sors le tout quelques minutes à l'extérieur de la tente le temps que çà gêle et que je puisse ainsi les balayer J'ai remarqué que le jour ou j'ai eu le plus de condensation qui a gelée c'est la nuit qui a suivi une journée ou j'ai beaucoup transpiré.
Départ 13h après un petit kawa partagé avec un garçon de Manchester super sympa.
15h30 Étape au magnifique refuge d'Alesjaure après une traversée d'un lac à couper le souffle avec avant Alesjaure, sur la gauche, un village de Samis. Le refuge est posé sur un promontoire qui offre une vue à 360 degrés exceptionnelle.
J'achète un coca et un écusson du refuge à la boutique et tape la discute avec un des 3 gardiens de la hutte vraiment intéressant. Il m'explique qu'ils sont rémunérés par l'office du tourisme mais ça leur paye juste de quoi manger durant la saison et peut être un petit peu plus mais sans être toutefois un vrai salaire. On y trouve donc des amoureux de nature et de grands espaces. Il y'a des jeunes mais la plupart sont des retraités.
16h je mets les voiles
Montée progressive jusqu'à un magnifique col
À 18h30 bivouac au col il fait -12
Repère carte : Allisvaji
Bilan de la journée 4h30 et 15 kms : journée tranquille voire pépère !
Samedi 6 avril :
Après une nuit très froide À -28 j'ai très bien dormi ma tente plantée au milieu de nulle part. Quand j'en sors le matin j'ai toujours ce petit moment de blocage et ce "Waou !"
Au fait j'allais oublier ; une envie pressante m'a permis de voir à 22h30 la fin d'une aurore boréale. J'en avais déjà vu une en Laponie finlandaise et comme d'habitude c'est magique.
Départ 9h30
Les paysages sont de plus en plus beaux
Bavante pour rejoindre une hutte un peu en dehors du chemin : Tjäktjastugan . Il y a une vingtaine de Rennes à côté de la hutte qui se nourrissent de presque rien.
Rencontre avec un couple de Lyon : Martine et Alain
Départ à 14h30 pour la montée au col de Tjäktjapasset ou il y a un très beau petit refuge non gardé à cheval sur le col
Après ce col une très belle descente avec une vue magnifique dans l'axe de cette vallée glaciaire avec un arrêt à la Meditationplats. Ces emplacements de méditation jalonnent la Kungsleden et sont placés à des endroits où les points de vues sont vraiment bien choisis.
A 18h30 je quitte les amis Lyonnais après avoir fait ces quelques kilomètres avec eux et plante le bivouac à 1 kilomètre de la hutte de Sälkastugorna
Bilan de la journée 7 heures et 22 kms : je suis rincé
Dimanche 7 avril
Météo de folie
Petit déjeuner au refuge où je retrouve Martine et Alain et le jeune de Manchester d'il y a 2 jours
Je fais la connaissance également de 3 "papis" suédois super sympas
Il fait froid ce matin car il m'annonce encore -17 à 10 heures du matin
La tente est couverte à l'intérieur de givre. En fait j'ai tellement transpiré la veille avec le beau temps et les 2 grosses bavantes que ça a condensé
Les chaussures sont durs comme du fer et c'est un vrai supplice pour les enfiler. À compter de ce jour je n'oublierai plus jamais de les délasser la veille avant qu'elle ne soit gelées !
L'accueil au refuge de Sälkastugorna est super sympa et donne envie de revenir
Je participe comme il se doit à la vie du refuge en coupant du bois, en vidangent l'eau sale.
Toujours pas programme en vue car avec ce jour en moins je ne suis plus sur de faire l'aller retour prévu
On verra la suite. C'est l'avantage de la tente c'est de pouvoir la planter n'importe où.
La nuit dernière il y a eu une magnifique aurore boréale vers les minuit. Merci encore pour la petite envie
Ils annoncent de la neige cette nuit alors mon idée de marche nocturne est peut être à revoir d'autant que les gens du coin me déconseillent car pour eux il est trop tôt dans la saison et les nuits sont encore trop sombres
Finalement à 14h30 je m'arrache et vais dormir non loin du prochain refuge de Singijaure avec une dernière grosse bavante
Je dors très mal, j ai très soif , j'ai les yeux tout gonflés enfin une nuit de merde
Bilan de la journée 16 kms et plus environ 5 heures
Lundi 8 avril :
Il a très peu neigé
-20 cette nuit
Les affaires dans la tente sont de plus en plus givrées voire mouillées
Après cette nuit pourrie , réveil sous un temps neigeux et brumeux
Le vent à tourné au nord et s'est renforcé aujourd'hui
Je pars à 10 heures
Direction Kebnekaise pour faire sûrement le demi tour du voyage
Magnifique descente vers une vallée glaciaire qui ne doit jamais voir le soleil et est soumis à des vents forts car la neige est soufflée. J'ai vraiment froid
Je ferai demi tour à 2 kilomètres du refuge de Kebnekaise fjallstation
Ce dernier tronçon est très minéral . Il y a une magnifique montagne (Duolbagomi 1662 mètres) que j'ai pris plusieurs fois en photos
Je croise dès mon demi-tour mes 3 amis suédois Leonardo Lada et ?...je ne sais plus le nom du troisième. On échange quelques plaisanteries de notre dernière rencontre et du coup le moral remonte un peu.
Je continue mon chemin
La fatigue se fait sentir
Je marche face au vent du nord : c'est épuisant, glacial
J'espère bien dormir cette nuit
Le bivouac est planté à 17h
Bilan de la journée 18 kms 6 heures
Mardi 9 avril
Lever 7h30. -19 ce matin
Plutôt une bonne nuit
J'ai super mal aux pied ; surtout les ongles. Les chevilles sont irritées et celle de gauche est enflée.
Le temps est correct
Il a un peu neigé cette nuit
Départ du bivouac à 10h
Je tire tout droit direction Sälkastugorna
Traversée du lac longue, très longue
Le soleil revient
Arrivée à Sälkastugorna à 12h30. Deux mushers font étape.
Je suis de plus en plus fatigué. J'ai des pertes d'équilibre comme si j'avais forcé sur la liqueur de gentiane !
Petite sieste de 20 minutes mais pas plus car je dois avancer
Je repars à 15h direction le col de Tjäktpasset
Dur dur très dur
La neige revient
Je finis sous une vraie petite tempête et plante le bivouac au col à côté du refuge
Un peu gavé ce soir, la fatigue comme la solitude se font sentir ... Vivement la bande a Ruquier ! Ce moment est devenu un vrai rendez-vous journalier immanquable. Je peste de devoir couper mon ipad quand je fais fondre la neige car le réchaud fait trop de bruit.
Et oui j'ai apporté mon IPAD avec des films et surtout mes podcasts préférés. Je recharge une batterie avec un panneau solaire qui est fixé sur ma pulka. La batterie alimente mon IPAD, une lampe à LED qui éclaire toute la tente, je peux également recharger mon appareil photo, les piles de ma frontale ….
Quand le bivouac est installé il ne faut pas se déconcentrer car bien des choses importantes sont encore à réaliser. Je dois en premier me changer de la tête aux pieds. Se forcer à faire à manger et ce n'est vraiment pas le plus simple. A bien s'hydrater. J'ai besoin de faire fondre et bouillir environ 3 litres d'eau entre le dîner et le petit déjeuner soit 2 grosses popotes. Il me faut environ 25 à 30 minutes à -15 -20° par popote avec un réchaud MSR XGK EX alimenté avec de l'essence Primus. En dessous de -15 le réchaud commence à pétarader. Au total une petite heure. Je mange une soupe avec des croutons, l'équivalent d'un bolino, du saucisson, une plaque de chocolat, un paquet de biscuits, des fruits secs … je bois 2 ou 3 thés et infusions.
Bilan de la journée 6h30 et 23 kms : pépère s'est aujourd'hui un peu bougé ;-)
Mercredi 10 avril :
Nuit meilleure que la précédente mais pas le top encore
Levé 7h30 et départ 9 heures
Il a neigé environ 20 cms cette nuit
Je descends au refuge de tjäktstugan : la météo est bonne. Beau soleil
Arrivée au refuge à 10h30
Je décide de faire une petite journée pour essayer de récupérer
12h le temps change brusquement
Le vent se lève
La neige commence a bien tomber
Les gens se detournent de leurs itineraires et viennent se mettre a l'abris au refuge
Le temps empire mais à 15h je décide de partir car je dois quand même avancer. Bonne nouvelle : le vent vient du sud ; je l'aurais donc dans le dos : on se console comme on peut !
Après 1h30 de galère je plante mon bivouac dans un vent de folie. Voilà un bel apprentissage grandeur nature. Enfin sur le coup je n'en mène pas large. Je calcule tous mes gestes et les commente à voie haute. La solitude commence à peser :-)
Dodo à 20h : pas besoin d'être bercé
Réveil à 4 h puis quelques 2 ou 3 petites demi heures de sommeil par-ci par-là
Jeudi 11 avril
Levé 7h30
Départ 9h45
je repars pour une pause déjeuner à Alesjaure ou j'avais eu un accueil super sympa
Le temps est génial
Sûrement la plus belle journée du voyage
On discute de tout et surtout de rien
On bois une bière sur un banc avec un autre de ses collègues . Quelques mots …silences … de nouveau quelques mots ... on n'a vraiment pas envie de se forcer …
À 14h le vent se lève de nouveau toujours du sud mais le ciel reste bleu azuré.
Je traverse ce magnifique lac avec ce village lapon à ma droite qui semble abandonné. Ils sont partis avec leurs troupeaux de Rennes
Malgré ce temps magnifique il n'y a pas intérêt à se retourner car le vent est glacial et on attrape l'onglée en moins de 2
J'ai de plus en plus de mal à avancer
17h : je finis par planter ma tente prêt de quelques huttes sur un plateau magique. Si c'est le dernier bivouac : c'est le plus beau
La nuit tombe ... moi aussi
Je me relève à minuit avec une envie pressante et comme d'habitude : une magnifique aurore boréale!
Vendredi 12 avril :
Lever 7h30 comme à peu près tous les jours
Belle météo
Il fait presque chaud
Ça condense à mort sous la tente
Départ 10h30. Beaucoup de temps perdu car le réchaud déconne
J'arrive à midi et demi à Abiskojaure avec un tout petit rythme
Je fais la connaissance du Responsable du refuge que je n'ai pas vu à l'aller et qui est super sympa. Il s'est défoncé le dos en tombant sur la glace
Je décolle à 15h après une petite sieste couché sur ma Pulka en plein soleil : le bonheur
Je pars avec l'idée de planter mon bivouac le plus prêt de la gare d'abisko car avant il y a le parc national où les bivouacs sont interdits
Finalement j'irai jusqu'à la gare car avant il m'est impossible de bivouaquer dans la zone du Parc National et avec le redoux sans les skis je m'enfonce dans la neige jusqu'à la taille.
18h45 arrivée gare d'abisko la boule à l'estomac à l'idée de sortir de ma bulle.
Fin du voyage
Le voyage en quelques chiffres ...